Il a été indiqué dans l'analyse portant sur la plainte, qu'en matière pénale, le parquet dispose de l'opportunité des poursuites. Ce qui revient à dire que lorsqu'une plainte est déposée, elle ne déclenche pas automatiquement un procès devant la juridiction de jugement. Les enquêtes menées par les autorités compétentes peuvent ne révéler aucune infraction à la loi pénale. Et dans ce cas, c'est tout à fait normal que le dossier soit classé sans suite au niveau du parquet.


Il peut cependant arriver que l'enquête préliminaire aboutisse au rassemblement d'informations et d'indices pouvant justifier la mise en mouvement de l'action publique. Et que le Procureur de la République décide quand même de ne pas engager de poursuites contre le ou les auteurs de l'infraction. C’est un pouvoir qui lui est reconnu par la loi. Ce principe de l'opportunité des poursuites lui permet même de choisir de poursuivre certains auteurs et pas d'autres.
Ce qui n'est pas toujours vu d'un bon œil par les justiciables. Lesquels ne comprennent pas toujours que certains soient jugés et d'autres pas, alors que tous ont commis des infractions. Dans le cadre de l'opération épervier par exemple, on a eu à entendre pareilles interrogations lors de certains débats sur les plateaux des radios et télévision de la place. Notamment lorsque certains gestionnaires des fonds publics ont été accusés de faute de gestion par les services du contrôle supérieur de l'État. Mais non pas fait l'objet de poursuites alors que d'autres étaient jugés et condamnés.
Il ne faut cependant pas croire que le fait de ne pas initier des poursuites à l'encontre d'une personne correspond à l'abandon des poursuites judiciaires par le Ministère public. Tant que les faits ne sont pas prescrits, l'auteur où les auteurs, tout comme le ou les complices, peuvent toujours faire l'objet de poursuites. Sans que les mis en cause ne puissent opposer au Procureur de la République le fait d'avoir initialement choisi de ne pas engager des poursuites. En exerçant ainsi ses prérogatives inhérentes à l'opportunité des poursuites, le Ministère public maintient une sorte d'épée de Damoclès sur la tête des personnes susceptibles d'être poursuivies, laquelle ne pourra se rouiller qu'avec l'avènement de la prescription. On peut néanmoins se demander si cette prérogative n'est pas de nature à donner lieu à des pratiques discriminatoires. En effet si l'opportunité des poursuites ne s'exercice pas avec beaucoup de perspicacité, elle pourrait être considérée comme étant une pratique discriminatoire. Or de telles pratiques sont condamnées par la quasi-totalité des instruments juridiques internationaux. Lesquels font également partie intégrante de l'arsenal juridique interne, dès lors qu'ils ont été ratifiés par le Cameroun.
Le Parquet doit donc agir avec beaucoup de tact pour ne pas donner l’impression de faire deux poids deux mesures. Il y a lieu de souligner que ce pouvoir de poursuivre ou de ne pas poursuivre tel ou tel autre justiciable, est dévolu au Ministère public pour être utilisé dans le sens de la protection de toute la société. En d’autres termes, il ne doit aucunement s’agir d’une volonté personnelle de cette autorité judicaire de nuire à tel mis en cause et de protéger tel autre. Seul doit compter l’intérêt général. Si les poursuites envisagées n’ont aucune incidence particulière sur la tranquillité de la société, alors, elles doivent être mises en œuvre. Quel que soit l’auteur. Et c’est d’ailleurs ce que font quasi-quotidiennement tous les Procureurs de la République au Cameroun. Mais s’il s’avère que la mise en mouvement de l’action publique est de nature à créer des tensions susceptibles de perturber la paix sociale, alors, le principe de l’opportunité des poursuites recommande que l’auteur ou les auteurs des faits normalement repréhensibles ne soient pas inquiétés. L’on comprend bien que cela est fait non pas par souci de protéger le délinquant, mais dans l’unique but de préserver la paix publique. Et bien évidemment, lorsque les circonstances le permettront à nouveau, le Ministère public aura l’opportunité, cette fois-là, de mettre en mouvement l’action publique. Sans aucun risque pour la société, dont seul l’intérêt doit guider la décision des autorités de poursuites. A la condition bien entendu que les faits ne soient pas prescrits.


Dieudonné Takam         
Avocat au Barreau du Cameroun
Avocat à la Cour Pénale Internationale
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